Curieux des évolutions politiques du Royaume-Uni, nous partageons avec vous l’analyse de la large victoire de Boris Johnson et de ses conséquences, par notre partenaire britannique Lodestone Communications.
Ce à quoi l’on doit s’attendre du Gouvernement de Boris Johnson
Ce fut finalement tout sauf une victoire à l’arraché. Impossible pour Jeremy Corbin de trouver une lueur d’espoir dans cette affaire… Il n’y a ici aucun « dernier soulèvement » anti-Brexit. Le Parti Conservateur a acquis une majorité – une large majorité, si l’on se réfère aux critères actuels – et le cycle d’élections semestrielles au Royaume Uni semble finalement avoir été brisé. Pour le meilleur ou pour le pire, le Royaume-Uni dispose à nouveau d’un gouvernement opérationnel.
Que va-t-il se passer désormais ? Boris Johnson semble décidé à ne pas faire trop de vagues jusqu’à ce que le Brexit soit acté. Son accord de retrait sera adopté par la Chambre des Communes. Le 31 janvier, les britanniques quitteront l’Union Européenne – pour un statut de transition, certes, mais ce sera tout de même un départ. Tout remaniement majeur ne se fera qu’après tout cela.
Boris Johnson mènera alors la machine gouvernementale à un rythme plus effréné qu’elle ne l’a jamais été en période de paix, car il sait qu’il n’a que 4 ans pour restituer la confiance qu’ont placé en lui les électeurs des Midlands, du Nord et du Pays de Galles.
Il commencera par finaliser le processus du Brexit avant la fin du mois de janvier, après quoi il poursuivra les négociations pour nouer de nouvelles relations commerciales avec l’Union européenne d’ici la fin de 2020. Dans le même temps, il cherchera à conclure d’ambitieux accords commerciaux avec les États-Unis et de nombreux autres pays. Les plaintes des fonctionnaires selon lesquels de tels accords ne peuvent être conclus rapidement donneront lieu à l’embauche d’experts du privé ayant une approche plus dynamique. Boris Johnson acceptera de faire abstraction des quelques questions insolubles qui retarderaient l’ensemble des négociations, mais insistera pour que tout le reste soit réglé. Il confiera à Michael Gove ou à une personne au profil similaire la direction d’un nouveau Ministère puissant, dédié au commerce, et chargé de la signature de ces accords.
Les accords commerciaux ne transformeront pas à eux seuls les villes laissées pour compte des Midlands et du Nord. Pour parvenir à cela, Boris Johnson utilisera tous les moyens à sa disposition. Dès que le Brexit sera achevé, il commencera à construire des ports francs, par exemple sur les 1800 hectares de la rive sud de la rivière Tees. Ces ports francs bénéficieront d’abord d’allègements fiscaux, mais, et c’est tout aussi important, ils prendront désormais eux-mêmes les grandes décisions de planification au niveau local, de sorte que les investisseurs n’auront pas à attendre des années avant d’obtenir l’autorisation d’agir.
Boris Johnson voyagera à travers le monde, vendant les opportunités d’investissement dans un Royaume-Uni sorti de l’Europe. Il a décrit avec admiration la vitesse à laquelle Hong-Kong avait construit son nouvel aéroport, et considère comme totalement inacceptable la tendance qu’a son pays à mettre des décennies à élaborer de grands projets d’infrastructure. Il estime qu’il a pour obligation de révolutionner la construction des nouvelles routes, voies ferrées, pistes et centrales électriques – en particulier dans le nord de l’Angleterre – et on peut ainsi s’attendre à ce que ces travaux soient finis en quatre ans plutôt que quarante.
Johnson a gagné l’élection en prenant au sérieux les requêtes des électeurs travaillistes de la classe ouvrière. Il sera désormais déterminé à tenir les promesses qu’il leur a faites. Le contrôle de l’immigration sera donc repris, à travers un système à points qui admet seulement les travailleurs qualifiés dont l’économie britannique a besoin, tout en empêchant l’arrivée de travailleurs non qualifiés. Les entreprises qui dépendent d’une main-d’œuvre bon marché devront réfléchir sérieusement à la productivité et à la manière de former les travailleurs britanniques au niveau requis. L’investissement dans les sciences sera doublé, les universités britanniques seront encouragées à continuer de recruter les chercheurs et les étudiants les plus brillants du monde entier, et les industries de haute technologie où la Grande-Bretagne possède déjà un atout concurrentiel seront renforcées.
Johnson a remporté cette élection parce qu’il a été plus intelligent et professionnel que Theresa May, plus rapide et plus audacieux dans la saisie des opportunités, et a fait preuve d’un optimisme et d’une énergie plus communicatifs, ce dont le pays aura besoin pour se redresser après le Brexit.
Des millions d’électeurs travaillistes qui ne supportaient pas la vue de Jeremy Corbyn, ont vu en Johnson un homme aux dons remarquables, capable d’établir une connexion avec les électeurs et de comprendre leurs exigences : un système scolaire de haut niveau, des emplois bien payés, un logement décent et abordable, des rues sûres et un système de santé de classe mondiale. Il s’occupera du face-à-face avec le public : son équipe se chargera du travail de fond. Il s’efforcera d’agir à un rythme tel qu’il ait toujours un coup d’avance sur ses adversaires. Il a déjà en vue une victoire encore plus éclatante en 2024.